Je publie ici la traduction-adaptation que j’avais faite, il y a un moment déjà, d’un conte de la lignée culturelle donso, cette confrérie à l’immense patrimoine musical, cultuel, littéraire, philosophique, cynégétique et qui a joué un rôle millénaire et central dans l’histoire de l’aire mandingue. J’ai essayé, comme dans les autres traductions proposées dans ce blog, de retranscrire la stylistique si forte de la littérature orale du Mali, ici un récit dit en maninka kan par le chasseur Djogo, de Bankoumana, et retranscrit par Youssouf Tata Cissé (La confrérie des chasseurs malinkés et bambaras, l’Harmattan). C’est le magnifique travail de l’association Djiguiya Blo, qui organise chaque année à Bamako le festival Donso Ngoni autour de ce patrimoine, qui m’a incité à vous proposer cette puissante fable écologique et humaniste. Elle avait inspiré un spectacle – Toute vie est une vie – dans lequel jouait Fatoumata Diawara, qui vient de recevoir une victoire de la musique pour sa participation à l’album Lamomali. Chaud souvenir !
Écoutez l’histoire de Flani Boyi,
Flani Boyi, maître chasseur,
Flani Boyi et ses quarante élèves.
Quarante élèves.
Il les enseigne,
Il se met en peine pour eux,
Aux quarante il trouve une épouse,
Pas un ne reste seul sauf lui-même, Flani Boyi, maître chasseur.
Ses élèves complotent, ils s’éloignent, ils rient de lui dans son dos :
– Notre maître et un imbécile.
Trouver des élèves jusqu’à quarante,
Leur chercher une épouse,
La leur donner et lui-même reste seul,
Vraiment, c’est un imbécile.
L’oreille de Flani Boyi apprend ça.
Ce jour-là, il s’assied pour en pleurer jusqu’à s’endormir sur ses larmes.
Mais avant de dormir, il lance ces mots :
– Demain, si c’est jour de chance pour le gibier,
Si je sors dans les bois profonds sans tuer et tuer,
Et si ma guerre ne finit pas dans le sang des bêtes,
Alors j’en finirai avec moi-même.